Elles étaient quatre qui voulaient se battre…

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© SEPAQ Crédit Photo : Yan Kaczynski | AIG - Parc national d'Aiguebelle |

Le règne végétal contre-attaque

Des caractéristiques propres au monde végétal font de certaines plantes des adversaires de taille lorsqu’elles sont jugées indésirables. L’autotrophie est la particularité qu’ont les plantes dites chlorophylliennes à synthétiser leur propre matière organique à partir d’éléments minéraux et d’une source d’énergie externe (la lumière). La totipotence est la fascinante capacité des cellules végétales à se différencier en n’importe quel type de cellule pour former un clone. Ces deux attributs révèlent en partie l’étonnante adaptabilité des plantes exotiques envahissantes (PEE). Mais ce qui explique avant tout leur propension à coloniser massivement un lieu est leur introduction, volontaire ou non, dans des environnements exempts de prédation ainsi que leur aptitude à se reproduire rapidement. Prend alors forme une lutte inégale, voire une menace envers des espèces indigènes fragiles et pouvant mener jusqu’à des extinctions ou du moins une perte dramatique de biodiversité.

La berce du Caucase (Heracleum mantegazzianum). Crédit pgoto : MAPAQ

Un enjeu tant global que local

Selon l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), les espèces exotiques envahissantes, qu’elles soient végétales ou animales, sont la deuxième cause de la perte de biodiversité dans le monde après la destruction des habitats. Leurs impacts sont donc d’ordre environnemental (en pouvant notamment causer la dégradation des sols et modifier les cycles d’incendie), social (en nuisant à la santé humaine et animale ou en empêchant certaines activités récréatives) et économique (coûts que représentent le contrôle ou l’élimination et la perte de productivité agricole et forestière).

La renouée du Japon (Reynoutria japonica). Crédit photo : MDDELCC

Bien que les PEE soient actuellement un enjeu plus préoccupant dans le sud de la province, le réchauffement climatique aura certainement pour effet d’accroitre leur présence à notre latitude et bien au-delà. Déjà, sur les vingt PEE observées dans la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, 11 ont été répertoriées dans la MRC du Fjord-du-Saguenay dont 6 au Bas-Saguenay.   Quatre d’entre elles sont actuellement sous surveillance dans le Parc national du Fjord-du-Saguenay : le roseau commun, la salicaire commune, la berce du Caucase et la renouée du Japon.

Quand la riposte s’organise

L’introduction des PEE a débuté il y a plus de 400 ans au Canada. Selon un rapport de l’Agence canadienne d’inspection des aliments publié en 2008, c’est principalement au cours du 20e siècle que le rythme et le volume d’introduction se sont accentués. Or, les multiples conséquences liées à leur présence ne sont documentées que depuis environ vingt ans.

La salicaire commune (Lythrum salicaria). Crédit photo : IRIIS Phytoprotection

Ces dernières années, les efforts se multiplient pour établir des stratégies de lutte, des recensements et de la sensibilisation. OBNL et municipalités se mobilisent à l’échelle de la province. Un portrait de l’état des lieux des plantes exotiques envahissantes dans notre région a été complété par l’Organisme de bassin versant (OBV) du Saguenay en 2021. C’est le Conseil régional de l’environnement et du développement durable (CREDD) du Saguenay–Lac-Saint-Jean qui en a assuré la coordination et la concertation pour ensuite mettre en place un plan d’action régional. Consultez leur guide d’information en balayant le code QR suivant :

Dans le but d’assurer la vitalité de sa biodiversité, la municipalité de Petit-Saguenay a quant à elle identifié l’éradication ou le contrôle de la pétasite du Japon d’ici 2026 sur son territoire parmi les objectifs figurant à sa politique de développement durable.

Ayant la conservation comme objectif prioritaire, les Parcs nationaux de la province ont également un rôle à jouer. Mis en place depuis 2004, le programme de suivi des indicateurs environnementaux (PSIE) de la Sépaq considère qu’un parc national est en santé entre autres lorsque les écosystèmes ne sont pas dominés ou modifiés de manière importante par des espèces exotiques envahissantes. Chaque année donc, et ce depuis 2004, l’équipe de conservation du Parc national du Fjord-du-Saguenay évalue la présence (ou la présence potentielle) de plus d’une dizaine de PEE. Un guide d’identification sera par ailleurs remis cet été à tout le personnel sur le terrain afin qu’on puisse géolocaliser rapidement les quatre espèces susceptibles de s’y retrouver.

Le roseau commun (Phragmites australis). Crédit photo : MAPAQ.

Vous souhaitez participer à la lutte au PEE ?

Nous retrouvons sur le site web inaturalist un groupe visant à assurer le suivi des PEE du Québec. À ce jour, 38 espèces sont identifiées pour un total de 7 656 observations par plus de 700 contributrices et contributeurs. Balayez ce code QR pour y ajouter vos propres observations!

L’application mobile Sentinelle, développée par le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP), est disponible gratuitement et permet d’obtenir de l’information sur 65 espèces exotiques envahissantes fauniques et floristiques. Vous pourrez transmettre vos observations directement de votre appareil mobile et celles-ci seront validées par des spécialistes du Ministère.

Un programme d’aide financière est également offert par le MELCCFP et la Fondation de la faune du Québec pour soutenir les initiatives visant à limiter l’introduction et la propagation des plantes exotiques envahissantes au lien suivant :

https://fondationdelafaune.qc.ca/programmes-daide-financiere/programme-pour-la-lutte-contre-les-plantes-exotiques-envahissantes/

Références

https://www.canada.ca/fr/environnement-changement-climatique/services/biodiversite/pourquoi-especes-exotiques-envahissantes-sont-nuisibles.html

https://www.creddsaglac.com/enjeux/la-proliferation-des-especes-exotiques-envahissantes/

https://www.environnement.gouv.qc.ca/biodiversite/especes-exotiques-envahissantes/index.asp

https://www.sepaq.com/parcs-nationaux/conservation/index.dot