Rencontre avec Chloé Bonnette, responsable au partenariat au Parc marin Saguenay-Saint-Laurent à la Sépaq.
L’Alliance Éco-Baleine est née en juin 2011 de ce que Jean Lemire appelle La vague verte, une prise de conscience d’une partie de la population des impacts environnementaux des activités d’observation de la faune et de la flore en milieu éloigné. « Ce que cela signifie pour une entreprise d’observation, c’est qu’elle se doit d’être à la hauteur des attentes des visiteurs et de rehausser ses standards de qualité », commente Chloé Bonnette, qui travaille, entre autres, à la formation des capitaines et des guides interprètes en mer depuis son arrivée au Parc marin.
Un processus d’amélioration continue
L’Alliance Éco-Baleine, c’est un regroupement volontaire, une table de concertation coordonnée par le parc marin, dont les membres sont des entreprises d’excursions opérant dans le Parc marin du Saguenay–Saint-Laurent, le Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM), la Sépaq et Parcs Canada. L’objectif étant de guider les entreprises vers de bonnes pratiques, donner l’occasion aux capitaines, aux gens de terrain d’échanger, de se former, d’acquérir de nouvelles connaissances et d’ainsi limiter les impacts des activités en mer sur l’environnement.
« Depuis le début, c’est un processus d’amélioration continue, on évolue ensemble au travers d’échanges, de formations. Un processus de changement des mentalités, ça prend plus que 10 ans ! Ça prend une génération, ça prend 25 ans ! Ce que l’on peut observer actuellement, c’est qu’en général, les jeunes capitaines sont beaucoup plus conscients des enjeux environnementaux, ils aiment avoir un cadre, des formations, ils utilisent les outils à leur disposition, ils embarquent complètement dans la démarche ! Ils comprennent ce qui se passe dans l’écosystème, voient la nécessité d’amener à la clientèle cette notion de privilège qu’elle a de pouvoir ainsi naviguer au milieu d’une aire marine protégée. »
« Une activité de croisière aux baleines, si elle est bien faite, en respect des règles et de l’animal, c’est une excellente façon de sensibiliser à la fragilité du milieu marin. Parce que ce que l’on voit, ce que l’on comprend, on l’aime, et ce que l’on aime on veut le protéger ensuite ! »
Le Règlement des Activités en Mer (RAM)
Pour pouvoir opérer en tant que capitaine sur le parc marin, il faut chaque année passer un examen, suite à une journée de formation sur le RAM. Ce règlement du parc marin dicte des vitesses maximales, des distances à respecter, des conduites à proscrire. Toutes ces règles se basent sur une documentation scientifique. « C’est documenté qu’en dedans de 400 mètres, on a un impact sur les baleines, on a un impact sur les bélugas, peu importe l’embarcation. C’est documenté que plus tu vas vite, plus tu fais du bruit, et plus tu déranges ! ajoute Chloé Bonnette. Ce règlement c’est le minimum, la base sur laquelle tous les usagers doivent agir pour minimiser leur impact et contribuer à la protection des mammifères marins. Mais après, ce que les membres de l’Alliance tendent à faire, c’est d’aller au-delà de ça ! »
Pour y arriver, l’Alliance a réuni une quarantaine de capitaines, naturalistes, gens du GREMM afin qu’ils concoctent un Guide des pratiques éco-responsables favorisant la qualité des activités d’observation et la protection des baleines. Elle a également mis un processus d’évaluation en place, avec notamment le programme du client mystère qui, avec une grille d’évaluation, mesure la qualité des messages qui sont transmis à bord des bateaux de croisières aux baleines durant l’été.
« L’idée, c’est d’accroître le volet sensibilisation chez tous les intervenants qui naviguent dans le parc marin. L’Alliance offre depuis 6 ans, une série d’activités de formation complémentaires à celle du RAM. On y propose entre autres des ateliers ou des conférences sur une vaste gamme de sujets comme l’histoire des phares, les oiseaux marins, la géomorphologie du fjord, etc. Puisque les années se suivent et ne se ressemblent pas, lorsqu’il n’y a pas énormément de baleines présentes dans le secteur, il y a tellement d’autres histoires fascinantes à raconter sur le Saint-Laurent. C’est aussi ça émerveiller autrement les visiteurs ! »
Croisières de découvertes
Chloé Bonnette de poursuivre : « L’offre actuelle de croisière est orientée principalement sur les baleines. Dans un monde idéal et pour mieux gérer les attentes des visiteurs, on devrait tendre vers des excursions de découverte du fjord et/ou du fleuve, dans l’habitat des baleines ! Il y a tellement à découvrir, l’histoire des villages riverains, la vie des petits pingouins, les légendes de phares, la richesse des fonds marins, des anecdotes à n’en plus finir ! » Elle est là pour ça l’Alliance Éco-Baleine, même s’il n’y a pas de baleine, c’est d’être capable quand même de faire de belles croisières, parce que ce métier de capitaine et de naturaliste dans un milieu protégé, c’est d’éveiller le visiteur à ce qu’il voit, sous tous ses aspects. Et on ne voit pas toujours que des baleines.
En conclusion, Chloé m’apprend qu’il existe des endroits sur la planète, comme en Basse-Californie où il n’y a pas d’excursion le matin, en Australie où il y a des croisières seulement une journée sur deux. L’Alliance doit s’inspirer aussi de ce qui se fait ailleurs pour poursuivre sa démarche d’amélioration continue et proposer une vision d’avenir pour les activités d’observation en mer dans le parc marin. L’avenir de la concertation et le temps qu’il faudra au changement des mentalités nous dira comment y arriver.
Pour information sur l’Alliance Éco-Baleine : eco-baleine.ca