Le lac Ha! Ha! Témoin de l’histoire

1995

En quittant la Grande Baie, une petite route sinueuse longeant le Bras-Hamel puis la rivière Ha! Ha! vous mènera doucement, toujours en montant un peu, jusqu’au magnifique et grandiose lac Ha! Ha!. Celui-ci dévoilant soudainement ses montagnes arrondies et ses falaises nous rappelle qu’on est bien encore en territoire Saguenéen, même si Charlevoix au loin se dessine doucement. Le lac, tributaire de la rivière Ha! Ha!, coule jusqu’à la Baie des Ha! Ha! sur une distance d’environ 48 km. L’histoire du lac se partage entre lieu de passage, foresterie, villégiature et lieu d’appartenance pour la communauté.

Histoire d’un lieu de passage

« En 1842, des Innus avaient laissé entendre aux Charlevoisiens qu’il était possible de faire un chemin entre la Baie Saint-Paul et la Grande Baie. Encouragés par cette nouvelle, un groupe de citoyens de St-Urbain et de Baie St-Paul, guidés par des Innus, ayant à leur tête Boniface Cimon, réalisèrent une exploration, ce qui confirma les dires des autochtones et d’un arpenteur nommé Bouchette. Ceci suscita l’intérêt du gouvernement qui confia à l’arpenteur Jean-Baptiste Duberger le mandat de trouver le meilleur chemin. Entre le 29 mai et le 23 décembre 1843, Duberger et son équipe posèrent les premiers jalons du chemin Bagot, entre St-Urbain et Grande Baie ainsi qu’un embranchement reliant ce tracé à la colonie du lac Nairne, au nord de St-Agnès. Le projet aura été mis en veilleuse pendant plusieurs années. » (source : Par-delà les monts 1ere partie de Gaétan Forêt, avril 2021)

Ce furent les débuts de ce qui allait devenir la route 381.

Jusqu’ au milieu des années 1990, le tronçon de route sinueuse et très montagneuse reliant Saint-Urbain et Ferland-et-Boilleau était fait de graviers. Une route pour relier deux régions en passant par les cours d’eau, traversant montagnes et lacs, longeant les rivières.

Histoire forestière

Vers 1902, des immigrants Finlandais et Norvégiens vinrent s’installer autour du lac afin d’y exploiter la forêt. Le bois de construction, pour la pulpe ou pour le chauffage était acheminé par flottage sur la rivière Ha! Ha!, puis chargé sur des navires à la Baie. Un an plus tard, ces travailleurs se sont dispersés. (Source : Gaétan Forêt, Par-Delà les monts 2e partie)

De la coupe de bois s’est aussi faite autour du lac Ha! Ha! à l’aide d’un bateau de type Alligator, un véhicule amphibie utilisé dans l’industrie forestière en Ontario et au Québec. Ces bateaux sont ainsi nommés en raison de leur capacité à voyager entre les lacs en se tirant avec un treuil à travers la terre !

Vers 1926, la Pulp and Paper Corporation créa le réservoir du grand lac Ha ! Ha! afin d’approvisionner en eau l’usine de Port-Alfred. (Source : plan hydrographique Chicoutimi 19 juillet 1926)

En 1996, lorsque la digue a cédé, le lac Ha!Ha! s’est vidé de ses eaux.

Ce fut cette même digue qui céda en 1996, lors du grand déluge qui fut dévastateur pour la communauté. En cédant sous la force de l’eau, elle créa un énorme canyon, arrachant tout sur son passage et inondant le village de Boilleau, le lieu-dit des eaux-mortes et emportant dans le fjord du Saguenay une grande partie du secteur Grande-Baie.

Histoire archéologique

Lors du Déluge en 1996, Nathalie Simard découvre quelque chose d’inusité. Elle est connue ici pour faire toutes sortes de découvertes géologiques spéciales, comme des fossiles provenant de la rivière Ha! Ha! ou des roches de toutes sortes. Elle a l’œil ! Lorsque le lac s’est vidé, il était possible de marcher sur ses fonds et c’est ainsi que Nathalie a trouvé ce qui ressemblait à une pointe de flèche. Le lac était redevenu comme avant, plus petit et traversé par la rivière à Pierre d’un bout à l’autre. Depuis la reconstruction de la digue après le Déluge, le niveau du lac est un peu plus bas, et rend cet écosystème très fragile avec sa partie artificielle et peu profonde.

 

Nathalie Simard raconte

J’ai trouvé cette pointe de flèche amérindienne en quartzite au bord du lac Ha! Ha! pendant qu’il était vide, suite au déluge de 1996. On sait que la région du Saguenay-Lac-St-Jean a reçu la visite des Premiers Peuples au sylvicole inférieur, une période qui s’étend de 3000 à 500 ans avant aujourd’hui. J’ai fait la rencontre de Noémie Plourde, archéologue sur le site de la Nouvelle-France. Je lui ai parlé de mes artéfacts, dont ma pointe de flèche. Elle m’a précisé que les outils sont plutôt en quartzite (bien différent du quartz de Boilleau). Ma pointe de flèche a donc été fabriquée dans le nord du Québec, dans une grotte appelée l’antre de marbre ou colline-blanche, un lieu sacré réservé aux rites chamaniques.  Elle aura fait tout un voyage.  

Histoire de villégiature et de plein-air

Durant toute son histoire, le lac Ha! Ha! a été mis en valeur par des gens passionnés qui l’on honoré et chouchouté. Ceux-ci ont pris soin de ses sentiers, construit et géré des campings, des chalets ou une auberge. Ils ont créé des souvenirs et continuent encore aujourd’hui de l’embellir et de partager son pouvoir magique, celui de redonner le sourire et d’apaiser l’esprit. C’est ce qui donne envie aux jeunes et aux plus vieux d’y retourner et de reconnaître le lac, notre lac.

Que tu passes par Charlevoix après avoir traversé le Parc de la Galette, et que tu aperçoives au loin le singulier Mont Dufour surplombant le lac ou que doucement tu remontes le chemin sinueux avec une forêt d’épinette en arrière-plan, que tu fasses du camping ou de la randonnée au petit ou au grand lac Ha! Ha!, tu te souviendras des chants sacrés des huards au crépuscule, des couchers de soleil orange et bleu au solstice d’été, des plages sablonneuses et douces , des champignons homards, de l’odeur du thé du labrador ou des beaux vieux merisiers oubliés par les bucherons. Sans oublier les nids d’aigle, précieusement cachés, le silence et ses millions d’étoiles au creux des cimes des épinettes, les chasseurs de perdrix et d’orignal, les cueilleurs de bleuets, comme figés dans le temps.

Notre lac

Il est beau

Il est grand

Il est vent parfois

Il est vivant d’histoire et d’humains

Qui l’ont traversé, dravé, buché, travaillé, marché et pagayé

 

Si vous avez envie de vivre le lac Ha! Ha! On vous invite à participer au rendez-vous Festif du kayak Ha! Ha! qui se tiendra au camping du camp d’accueil du 9 au 11 septembre 2022. Allez camper au Camping Camp d’Accueil ou du petit lac Ha! Ha! Pour les randonnées autour du lac : Sentier de la rivière-à-Pierre (Camp d’Accueil), Sentir du Mont Dufour, du Mont Toby et de la colonisation (Petit lac Ha! Ha!), Sentier des Pins et de la Digue (Halte routière du Pont-Couvert et de la Digue)