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Elle est pour le feu une friandise. Elle est la peau des plus beaux canots. Elle fut le revêtement des anciens campements. Pliée et cousue de racines, on l’eut rempli de fruits ou de médecines. Défaite en minces couches, c’est un papier de soie, entière elle est entre le cuir et le bois. Mais elle est tout d’abord la robe blanche d’un arbre aux fines branches.

La peau du bouleau fut aux premières nations ce que le plastique est à notre génération. Une matière d’une polyvalence sans égal.

Voici une liste exhaustive des utilisations de ce cuir végétal : paniers de cueillette et de pêche, sac à dos, porte-bébé, carquois, étui à couteau, tabac ou poudre, canot, bandeaux de portage, wigwam, casserole, louche, seau pour l’eau d’érable, cône pour caller, papier à communiquer, décorations, lunettes contre les reflets du soleil, etc. Cette polyvalence lui vient de ses nombreuses qualités : elle est perméable à l’air et imperméable à l’eau comme le « goretex », elle est flexible, elle est relativement légère, elle flotte, elle résiste à la pourriture, elle ne transmet pas de toxine ou de goût à l’eau ou aux aliments, elle est répandue et abondante presque partout, enfin, elle est très jolie, surtout une fois gravée.

Si l’on tire sur l’écorce d’un arbre, en général celle-ci se détache en suivant le sens du tronc. Les bouleaux font partie des rares espèces à être ornées d’une écorce dont la fibre est perpendiculaire à celle du bois. Sans cela, je ne vois pas comment on aurait pu arriver à construire des canots aussi solides, aussi efficaces et avec aussi peu de moyens.

Mais les bouleaux « à canot » sont apparemment devenus plus rares depuis l’époque de la traite des fourrures. Les besoins en voiture d’eau étaient devenus si importants, qu’une usine de fabrication naquît à Trois-Rivières. C’est là que sont nés les canots de maîtres, mesurant jusqu’à 36 pieds (11m) de long. Il faut savoir qu’en plus, il est assez difficile de trouver un bouleau qui rencontre toutes les qualités nécessaires à la conception de ce type d’embarcation.

Si prélever de fins lambeaux d’écorce ne nuit pas aux bouleaux, récolter celle-ci sur toute son épaisseur crée une blessure à l’arbre qui guérira difficilement. Les rondins de bois de chauffage (avant d’être fendus) restent une bonne source d’approvisionnement pour avoir accès à cette précieuse matière d’artisanat.

Je lève mon chapeau aux humains et aux bouleaux