
Quand on marche dans un sentier, on a un peu l’impression que ce dernier a toujours existé, surtout s’il est bien intégré à son milieu. Il y a quelque chose d’un peu magique là-dedans. Mais qui a fait ça et comment ? La plupart des animaux terrestres entretiennent des sentiers afin de circuler sur leur territoire en dépensant le moins d’énergie possible. L’humain n’échappe évidemment pas à cette règle.
À la base, il s’agit essentiellement de circuler par un itinéraire ergonomique et de repasser maintes et maintes fois en entretenant la végétation au passage (branches, arbres tombés).
Mais pour qu’un sentier pédestre plus raffiné voie le jour, il en est tout autrement. L’énergie déployée est assez imposante !
Pour vous partager les réalités de ce savoir faire, j’ai contacté un pilier dans le domaine, Jacques Racine. C’est aussi pour moi un mentor et surtout un grand ami avec qui j’ai appris et partagé cette passion.
JFG : D’abord Jacques, depuis combien de temps fais-tu de l’aménagement ?
J.R : Depuis environ une trentaine d’années.
JFG : Comment as-tu commencé ?
J.R : À l’époque, j’avais une petite ferme de subsistance et j’avais décidé de vendre mes animaux. Dans le même temps, le Parc Saguenay prenait racine et cherchait des travailleurs pour développer un réseau de sentiers pédestres.
Moi : Que préfères-tu dans ce métier ?
J.R. : Je crois qu’on a tous dans notre ADN un gène pour ça. Voyez comment les enfants aménagent d’instinct des petites rigoles pour gérer l’eau. De mettre à profit ce « gène » pour aménager des sentiers dans des territoires majestueux est pour moi profondément satisfaisant. J’aime aussi la portion exploration et balisage. On doit faire appel à notre sensibilité pour trouver les plus beaux trésors du coin afin de les mettre en valeur pour toucher les futurs randonneurs.
JFG : Qu’est-ce que tu trouves plus difficile ?
J.R. : Ce que j’ai trouvé plus difficile, c’est de constater que bien souvent les gestionnaires n’ont malheureusement pas souvent les budgets pour entretenir suffisamment les sentiers et donc ces derniers se dégradent plus rapidement.
JFG : Peux-tu me décrire brièvement comment tu procèdes pour baliser un futur sentier ?
J.R. : Pour faire simple, je dirais que premièrement, il faut identifier les points d’intérêt dans le secteur concerné et deuxièmement, les relier de la façon la plus ergonomique possible en évitant les zones humides au maximum.
Jacques Racine continue à œuvrer dans le domaine comme consultant ou chargé de projet. Conscient que son corps demande une diminution du travail physique intense, il cherche depuis quelques années à passer le flambeau progressivement. Ayant senti l’appel mais ne pouvant prendre cette charge seul, j’ai proposé à des collègues et amis de mettre sur pied une équipe d’aménagement de sentiers au Bas-Saguenay. Voilà qu’est née l’entreprise Roches et Racines.
Le but est de créer une coopérative avec des travailleurs (ses) d’ici, pour des projets d’ici. Nous visons à mettre en valeur ce métier manuel et artistique en s’offrant de bonnes conditions et un climat de travail agréable. Nos valeurs : allier la sensibilité du milieu naturel et le travail de qualité. Le patrimoine des sentiers de notre milieu est un précieux héritage que nous avons reçu de nos prédécesseurs. Nous sommes désireux de l’honorer et de poursuivre ce noble travail.