La Coopérative de Ferland-et-Boilleau, entre traditions et innovation

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Cathy Lavoie, superviseure au Centre de valorisation des ressources forestières, se démarque par sa vaillance, son engagement et sa rigueur.

À la découverte des PFNL (Produits Forestiers Non Ligneux)

C’est au cœur de la forêt boréale, dans l’arrière-pays du fjord du Saguenay, qu’en 1963, une trentaine de travailleurs forestiers fondèrent le Syndicat coopératif de l’union des cultivateurs Catholiques de Ferland-et-Boilleau. Ils s’organisaient suite à la fin des contrats de coupe octroyés par la Compagnie Price ltée. En 1972, les chantiers de Grande-Baie et de Ferland-et-Boilleau fusionnèrent sous l’appellation de chantier coopératif de Ferland-et-Boilleau. En 1976, débutent des coupes de protection et de régénération, c’était le commencement des travaux d’aménagement de la forêt publique. En 1983, la formation d’une nouvelle compagnie sous le nom de Scierie du Fjord est créée avec la Coopérative des travailleurs de Petit-Saguenay et la Coopérative de travailleurs de L’Anse-Saint-Jean. En 1985, la Coopérative forestière de Ferland-et-Boilleau porte son nom actuel.

Le gouvernement du Québec octroie alors un contrat de production de plants d’arbres en serre. Plus de 5 millions de plants sont fournis annuellement pour une période de 5 ans. Plusieurs personnes du village travaillent à ce complexe de serres, surtout des femmes et des jeunes, ce qui contribuera à l’esprit coopératif et dynamique de la localité. Plusieurs se souviendront avec nostalgie du temps passé à s’occuper et à fraterniser autour des petits plants d’épinettes blanches. Le complexe de serre cesse ses activités en 2003.

Avec le début vers 2006 de la crise dans l’industrie forestière, la Coop explore de nouvelles avenues. Un partenariat est créé avec la Coop de Girardville et les épices d’Origina voient le jour. « C’est là qu’on a rencontré Fabien Girard et que de la prospection afin de trouver des plantes avec du potentiel a débuté », explique François Fracheboud, qui travaille maintenant au centre de valorisation des ressources forestières. Un partenariat est créé avec le laboratoire La Sève de l’UQAC, ce qui ouvrira la porte au volet distillation des huiles essentielles. « C’est le thé du labrador qui a intéressé le laboratoire de Lise Wathier, il a utilisé l’image de la Coop pour sa campagne marketing en Europe, cela nous a permis de nous faire connaître », selon Éric Simard, directeur administratif de la Coop et président directeur général de GBR (Groupe BoréaRessources). En 2014, GBR voit le jour et la Coop forestière en est actionnaire majoritaire. La Coop distille maintenant de l’huile essentielle d’épinette noire, de sapin, de pin gris, de thé du labrador, de myrique baumier et de peuplier baumier principalement. Ces huiles sont vendues en gros à travers le monde. Depuis 3 ans, la Coop s’est associée à Silicycle dont elle est actionnaire à 50%. Cette dernière s’occupe de la mise en marché et de la distribution de flacons d’huiles essentielles au détail. On peut trouver un peu partout au Québec ces huiles sous forme de jolis coffrets, notamment au IGA Verreault de La Baie.

Dernièrement, un investissement de 850 000 $ a été réalisé afin de moderniser les installations. Un alambic de 5000 litres est ajouté aux installations, ce qui a quadruplé la possibilité de production. À cet alambic s’ajoutent un séchoir industriel et un système de récupération de l’eau de distillation qui sert à la fois à faire fonctionner le séchoir ou à chauffer l’endroit. La Coop a un souci de préservation de la ressource et ses huiles sont certifiées Éco-Cert Canada. « On essaye de faire de l’économie circulaire, les sous-produits sont toujours réutilisés, on n’en jette pas », toujours selon Éric Simard. « Les résidus de la distillation sont utilisés par la bleuetière de Ferland-et-Boilleau afin d’amender le sol, l’eau de distillation est récupérée et les têtes d’épinettes trop petites pour l’industrie forestière sont distillées », complète Cathy Lavoie, superviseure au centre de valorisation des ressources.

Plusieurs types d’écorces dont celles de l’épinette, de l’érable et du chêne blanc sont séchées au centre de valorisation des ressources. Les écorces sont ensuite transformées en poudre, et envoyées à des compagnies pharmaceutiques en Europe effectuant des recherches sur le cancer. Lucas Mayor est un partenaire important pour ce volet. Cet été, des centaines de livres d’épilobe ont été séchées à l’usine et seront envoyées en Europe à des fins d’études sur le cancer de la prostate.

Plusieurs plantes servant à concocter le fameux gin KM12, qui fait la fierté de la région, sont également cueillies par des gens d’ici, et séchées à la Coopérative forestière.

Enfin, le BRF (Bois raméal fragmenté) produit à l’usine, qui sert notamment à amender les plates-bandes de ville Saguenay, est très prisé en horticulture et reste un beau produit à connaître.

« On cherche toujours à trouver d’autres voies pour valoriser la forêt. Mais c’est long, c’est de l’inconnu, il faut faire de la prospection, de la recherche tout en restant rentable », conclut Éric Simard.

Aujourd’hui, la Coopérative forestière Ferland-et-Boilleau livre plus de 300 000 mètres cubes de bois par année à différentes usines de la région et est actionnaire depuis 2012 de la scierie Groupe Lignarex. Plusieurs travaux d’éclaircie pré-commerciale, de dégagement de plantation et de reboisement sont effectués chaque année par des équipes passionnées. En 1963, le chiffre d’affaires était à 125 000$ par année, aujourd’hui, on approche le cap des 10 millions.

Plusieurs personnes, parfois sur plusieurs générations, ont participé par leurs efforts, leur appartenance au milieu et grâce à un esprit coopératif et visionnaire, à faire de la Coopérative forestière de Ferland-et-Boilleau ce qu’elle est aujourd’hui. C’est une fierté pour le village et sa renommée dépasse nos frontières. La Coopérative offre à ses membres travailleurs un milieu où respect, équité, engagement et développement durable se côtoient et elle est toujours prête à s’impliquer dans la communauté, où elle est bien enracinée.

Si vous souhaitez voir les installations et comprendre un peu mieux le volet PFNL (Produits Forestiers Non Ligneux), la Coop organise depuis 4 ans, au centre de valorisation des ressources forestières, l’activité Distille ton sapin. Cette année, ce sera le 15 janvier que tout le monde pourra apporter son sapin de Noël afin qu’il soit transformé en huile essentielle et repartir avec un petit flacon. Des gens de la Coop seront sur place et il est possible de voir les installations et de poser des questions.

On peut s’imaginer qu’avec tous ces investissements et ces projets en cours, la Coop continuera à diversifier ses activités, à surprendre avec ses projets innovants et à faire rayonner le village de Ferland-et-Boilleau !