Réinvestir la bibliothèque municipale avec du soleil et de la poésie

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L’inauguration de la bibliothèque était l’occasion pour le comité de la bibliothèque de convier la population à se l’approprier. Sa petite taille ne signifie pas nécessairement moins de choix grâce aux services de prêt entre bibliothèques. Pour Claude Breton, responsable du comité bénévole, « C’est fini le temps où dans les bibliothèques, c’est chut! chut! On peut mettre de la musique, on peut jaser! » La présence de deux artistes locaux, Marie-Andrée Gill et Hugo Lapierre, témoigne de la volonté du milieu de faire foisonner la culture dans cet espace logé au sous-sol de l’église. Ces personnages qui font briller le Bas-Saguenay se passent de présentation pour plusieurs d’entre vous.

Une performance unique cité Hugo Lapierre

Hugo Lapierre roule sa bosse comme comédien‐chanteur depuis ce qui lui semble être toujours. Plusieurs d’entre vous l’avez connu comme metteur en scène pour la pièce Marguerite. Hugo ne refuse jamais une invitation pour revenir voir les gens de Petit-Saguenay, qu’il tient en haute estime si l’on se fie à la performance qu’il nous livre cette soirée-là. « Il y a plus de soleil dans les yeux des gens du village de Petit-Saguenay qu’ailleurs au monde. Vous savez pourquoi? Parce que Petit-Saguenay, c’est dans une belle vallée, et on a moins de soleil : il arrive plus tard le matin, et part plus tôt le soir. » Il souligne ainsi un phénomène unique : le nombre impressionnant de marcheurs quotidiens, motivés selon lui par le besoin d’avaler du soleil!

Entretien avec une artiste réfugiée au presbytère

Marie-Andrée Gill est une autrice, poète, enseignante, chroniqueuse et animatrice de balado de la nation des Pekuakamiulnuatsh. Ayant passé plusieurs années à L’Anse-Saint-Jean, elle déménage à Petit-Saguenay pour s’installer dans l’ancien presbytère en 2021. Elle n’a que quelques pas à faire pour se joindre à ce 5 à 7 auquel elle a été conviée, bien heureuse de faire une apparition dans son milieu alors qu’elle parcourt régulièrement le Québec, sur la route ou numériquement, au gré des invitations.

Claude Breton : Comment en es-tu venue à écrire de la poésie et publier?

M-A.G. : Je pense que tout a commencé dans une bibliothèque, chez nous à Mastheuiatsh, où j’étais tout le temps là. C’était un intérêt pour la lecture, qui s’est transformé en un intérêt pour la littérature. Je pense vraiment que la littérature, ça change une vie, ça change quelqu’un. La littérature m’a ouvert au monde, m’a ouvert le cœur aussi sur ce que les autres vivent. Même si on lit une fiction, un roman, c’est toujours basé sur des émotions humaines. Comment j’en suis venue à écrire moi aussi, je sais pas, c’était naturel, ça allait de soi. La poésie m’a attirée parce que c’est une forme courte, travailler et écrire 100 pages, je trouve ça long [rires].

C.B. : Tu as plusieurs cordes à ton arc. Tu fais beaucoup de représentations, tu fais même de la radio aussi?

M-A.G. : Je participais avant à l’émission « Plus on est de fous, plus on lit », et maintenant, c’est Il restera toujours la culture. C’est des chroniques qui parlent de littérature. Je fais ça par téléphone, eux-autres m’appellent de leurs bureaux à Montréal, et moi, je parle d’un livre que j’ai lu et que j’ai aimé, et je dis au monde pourquoi faudrait le lire. 

J’ai fait un balado qui s’appelle Laissez-nous raconter l’histoire crochie, disponible sur la plate-forme OHdio de Radio-Canada. Je vous le recommande vraiment. C’est une série de 11 émissions où on décolonise l’histoire. Tout ce qui est par rapport aux Premiers Peuples, ce que tout le monde a entendu par rapport à ça, il y a beaucoup d’affaires qui ne sont pas fidèles à la réalité. L’équipe de tournage s’est déplacée dans toutes les communautés, et elle a interviewé des gens pour connaître leur avis sur 11 mots à décoloniser; c’est-à-dire, à faire changer de perspectives. Par exemple, le mot réserve : d’où ça vient ce mot là, on est tu d’accord avec ça? Ou encore le mot école, pour parler des pensionnats, ou bannique, pour parler de l’alimentation. C’est un projet dont je suis vraiment fière parce qu’en écoutant ça, on est plus informés sur les réalités des Premiers peuples, et c’est un pas vers plus de connaissances pour le grand public. 

C.B. : Tu es présidente d’honneur du Prix Damase-Povtin, qui est un concours de nouvelles sur le thème du feu, que tu as choisi. Tout le monde peut participer, est-ce que tu peux nous en parler? 

M-A.G. : C’est un concours régional de nouvelles. Vous pouvez écrire une histoire courte, il y a une catégorie jeune adulte, adulte et professionnelle, et l’envoyer. Il y a un jury anonyme qui vote pour le meilleur texte de l’année. J’ai choisi les feux parce que c’est un beau mot, et aussi parce qu’il y a eu des feux toute l’année. Quand j’ai commencé à écrire, dans mes débuts, j’ai envoyé un texte à ce prix là, et d’autres prix comme ça, et c’est tranquillement que ma carrière a commencé. Le Prix Damase-Potvin m’a reconnue d’une certaine façon, je me suis sentie légitimée dans ce que je fais. À l’époque où j’avais envoyé mon texte, la présidente d’honneur, c’était Marie-Sisi Labrèche, qui a écrit entre autres Borderline. Je l’avais lu, et je me trouvais chanceuse de pouvoir assister à cette conférence. Quand ils me l’ont demandé, je me suis dit coudonc, c’est rendu à mon tour, la roue tourne. Je vous invite vraiment à participer, ne vous gênez pas. En plus c’est anonyme, s’ils vous prennent pas c’est pas grave. Ça m’est arrivé aussi d’envoyer des textes et qu’ils ne me rappellent jamais. On réessaye une autre fois !